mercredi 7 mai 2014

Gélose de patate dextrosé (pour la culture de champignon comme les morilles par exemple)



Bon ça c'est des vieux réflexes qui resurgissent parfois et qui me font faire des projets de ce genre-là. 

Il y a 2 ans, quand ma grande avait trouvé sa morille blonde à quelques mètres de la maison, j'avais fait une première culture de blanc de morille blonde et tenter d'ensemencer une parcelle de terrain chez moi. J'écris tenté, car on ne voit pas encore de résultat en terme de fructification. Mais la morille semble-t-il n'est pas simple et le succès est loin d'être garanti comparativement à d'autre sorte de champignon (pleurote, shiitake) de culture plus facile. Moi pour mes débuts en culture de champignon, j'ai décidé de m'attaquer directement à la morille, c'est un peu casse-gueule! Toujours est-il que multiplier le blanc de champignon (le mycélium), ce n'est pas ça qui est difficile pour moi alors j'ai décidé de retenter l'expérience avec les morilles cette année. Ayant gardé du mycélium de morille blonde au congélo, je l'ai resorti le week-end dernier pour repartir la multiplication du mycélium de cette morille.

Ce qui m'a motivé? Encore une fois une conversation avec mon ami Vincent. Quand j'ai eu fini de faire mon sirop d'érable autour du 22 avril, il m'a mentionné que les morilles noires avaient commencé à sortir 4-5 jours auparavant dans son spot (donc autour du 17-18 avril 2014). Je sais que son spot est beaucoup plus au nord que le mien par chez moi, alors il n'en fallait pas plus pour que j'aille faire un tour au spot que j'avais découvert par hasard il y a 2 ans. 

Bingo, 3 minuscules morilles y pointaient déjà le bout du nez en ce 23 avril 2014 (2 étaient quasi microscopiques, non quand même pas, mais quand même très, très petites et n'ont jamais eu le temps de grossir, elle se sont faite bouffer par les limaces). L'an dernier, je les avais manqué par manque de repères dans le temps pour zieuter le spot. J'ai dû regarder beaucoup trop tard pour les voir. Toujours est-il que je sais que ce spot a fructifié il y a 2 ans (4-9 mai 2012, d'ailleurs les spécimens étaient déjà bouffés par les limaces, donc peut-être tard en saison... la morille blonde, pour sa part, avait été trouvé le 12 mai 2012 à un autre spot) et qu'il a encore fructifié cette année. J'ai trouvé les spécimens de cette année dans un rayon de max 1 mètre par rapport à l'endroit où je les avais vu il y a 2 ans. Maintenant j'ai aussi un nouveau repère pour le début de la saison des morilles chez moi: Quand l'eau d'érable commence à goûter le bourgeon et que c'est la fin de la saison des sucres, ben c'est le temps de commencer à zieuter les spots à morilles noires!

morille 1 minuscule

gros plan sur la morille 1

limace en action sur la morille 1

Les caractéristiques du spot: un coin de peuplier faux-tremble, à proximité il y a des détritus de vieille briques et de vieilles dalles en désagrégation. Elles (les briques et dalles) étaient enfouit sous une +/- mince couche d'humus il y a 3-4 ans... mais ayant aperçut des bouts de sac de plastique dépasser du sol, je suis allée "nettoyer" le coin de ce tas de vidange il y a de cela 3-4 ans justement... découverte de vieille canette de bière et autre bidules humain qui devaient être là depuis déjà au moins une décennie si c'est pas plus! j'ai quand même laissé les morceaux de briques et de dalles en décomposition à cet endroit, j'appelle ça de l'urbanite ce genre de cailloux! L'endroit ressemble à une minuscule entrée de cours (ou de terrain) pour passer un fosset, au bout il y a une grosse roche granitique et pouf ça descend d'un pied. La couche d'humus sur la roche est d'environ 2cm, mais c'est là que je trouve les morilles noires. J'ai pris le pH du sol hier (et trouvé une 4e morille noire à ce spot), il fait 7.4... c'est plus basique que la moyenne autour, surtout où il y a des conifères (et c'est le pH que vincent tente d'obtenir pour ces morilles en forêt). À savoir aussi, une partie de la cendre de bois qu'on étend sur notre bout de chemin cul-de-sac en hiver se ramasse vers ce spot. Au lieu d'acheter du sel de déglaçage, comme on a de la cendre, c'est ce qu'on utilise ici quand la ville tarde à passer, ou même pour notre entrée de cours. Voilà pour les caractéristiques de ce spot.

morille 2 aussi minuscule que la morille 1 et qui sera bouffée par les limace avant de venir a maturité

Morille 3 qui a été utilisé le 3 mai 2014 avant maturité pour éviter qu'elle soit bouffé par les limaces
morille 4 apparue après le 3 mai 2014 (aperçue le 6 mai et laissé en place) 


Ayant donc des morilles noires dans le spot qui n'est pas chez moi, j'ai décidé de partir du mycélium de morille noire aussi pour me faire une parcelle à la maison. Me revoilà donc à préparer des géloses!

Pour les géloses, j'ai aucune envie d'acheter des boîtes de pétri en plastique non-réutilisable qui finiraient leur vie au poubelle. Alors je prends des pots mason 250 ml à ouverture large. J'utilise la bague, mais pas le disque du couvercle, celui-ci est remplacé par du tyvek. J'ai acheté une combinaison (coverall) pour peintre fait en tyvek et j'ai découpé des disques de la grosseur de mes pots à grande gueule. Le tyvek a l'avantage de permettre les échanges gazeux (nécessaire à la culture), mais d'avoir des pores (trou) minuscules qui ne laissent pas passer les contaminants (bactéries, autres champignons et moisissures) et il est autoclavable sans perdre trop sa propriété de filtre. Habituellement en labo, selon l'usage, on veut des filtres ayant des pores de 0.2 micron ou de 0.45 micron. Le tyvek s'approche de ça selon le type précis utilisé (voir le site de tyvek pour ça, le tableau de la page 10 est utile). J'ai donc pris du tyvek pour cette fois-ci, mais je songe à me procurer des filtres plus épais et plus rigides pré-découpé pour "fiter" sur les couvercles de pots mason pour ceux qui font de la culture de champignon à la maison. 

Recette de gélose de pomme de terre dextrosé (pour un litre, ou 20 pots mason 250ml grande gueule)

Ingrédients:

300g pomme de terre avec pelure lavée et coupée en petits morceaux (on peu aussi prendre nos épluchures de patate (j'ai jamais essayé avec les patates douces, ici c'est" patates" comme 99% des québécois utilisent comme terme ;) ) du souper pour leur donner une 2e vie! si on a du topinambour on peut aussi l'utiliser à la place des patates, j'ai déjà fait et ça marche très bien)

De l'eau pour couvrir (sans dépasser 1 litre pour la cuisson)

20g de dextrose (les boutiques pour vin en ont ça coûte pas grand chose du kilo, sinon 1 cas de miel fait l'affaire aussi mais coûte plus cher, ou 1 cas de sirop de maïs)

15g d'agar-agar (plusieurs recettes sur le web en utilisent beaucoup plus, moi je m'en tiens à ce que j'étais habitué de faire en lab de recherche, soit 7.5g par bouteille de 500ml)

Préparation:

Faire bouillir les pomme de terre (ou topinambour) dans max un litre d'eau pendant 30 minutes.
Égoutter en récupérant l'eau des patates (idéalement dans un litre à mesurer).
Ajouter le dextrose (ou miel, ou sirop de maïs), bien brasser pour dissoudre
Mesurer le volume et compléter à un litre avec l'eau du robinet (si elle est non-chloré, ce qui est le cas chez moi)
Ajouter l'agar-agar.

Ne perdez pas votre temps à dissoudre l'agar-agar, ça se fera tout seul dans l'autoclave. 

Répartir le liquide (milieux nutritif à champi) dans vos pots Mason à raison de 50ml (environ 3 c. à soupe) par pot. Vu la hauteur du pot, je trouve que cette quantité est optimale pour travailler. On pourrait en mettre moins par pot (genre 25-30ml comme dans un plat de pétri en plastique destiner à cet usage), mais comme le rebord des pots est plus haut que celui d'un pétri, il sera plus difficile de travailler avec les instruments si on met moins que 50ml par pot. plus que 50ml, je trouve que c'est du gaspillage de milieu nutritif et d'agar (c'est ce qui peut coûter le plus cher parmi les ingrédients). Si cette opération vous prend du temps, à tout les 3-4 pots, rebrasser le liquide pour redistribuer l'agar afin d'en avoir dans tout les pots (l'agar non-dissout tombe au fond du litre à mesurer, il faut donc la redistribuer occasionnellement).

Installer le couvercle avec la rondelle de tyvek.

Mettre les pots dans l'autoclave et traiter 20 minutes avec la pesée 15 lbs.

Une fois le traitement fini et l'autoclave refroidi (pression retombée seulement comme lorsqu'on fait de la bouffe), sortir les pots de l'autoclave comme d'habitude avec les pinces à conserve.

Poser les pots sur le comptoir et laisser refroidir. Le liquide va figer et les géloses seront utilisables dès qu'elles seront assez refroidit. Un test facile pour ça, si vous êtes capable de mettre votre pots dans votre main (fond du pot sur la paume) et de garder le pot plus que 30-60 secondes, c'est que la température du liquide est sous 50-55C. L'agar commence à figer un peu au-dessus de cette température. Ne pas utiliser tout de suite de milieu de culture s'il est à une température au-dessus de 50-55C, ceci tuerait votre mycélium ou endommagerait beaucoup votre tissus à "multiplier".



Pour utiliser les géloses à la maison il n'est pas essentiel d'avoir une hotte décontaminée avec filtre hepa et tout le pataclan. Si vous aimez ça, vous finirez probablement par vous en fabriquer une modeste, mais pour des petits besoins ponctuels, je trouve l'utilisation du brûleur martin (ou autre brûleur à camping) beaucoup plus approprié et accessible monétairement. En fait, dans une grande proportion de labo (ou groupe de labo) de recherche (ça dépend quand même du sujet de recherche et du groupe dans lequel on est), la règle est généralement d'utiliser les hottes à flux laminaire pour les cellules plus sensibles (cellules provenant de tissus animal ou humain généralement, parfois végétale qu'on veut éviter de contaminer avec des bactéries), puis les bactéries, levures et champignons sont manipulés dans un rayon de 30 cm d'une flamme bleue d'un brûleur bunsen. La température élevée à proximité du brûleur bunsen avec flamme bleue assurant un environnement relativement stérile. Il faut cependant éviter tout courant d'air pour maintenir le champs stérile. Il faut travailler (ouvrir les bouteilles de milieu de culture ou les géloses) dans un rayon max de 30 cm de la flamme pour demeurer dans ce champs stérile. On évite aussi de laisser nos contenants ouvert très longtemps ou de passer avec nos mains par-dessus les milieux de cultures lorsqu'ils sont à découvert ou de respirer fort (une quinte de toux quelqu'un?) en direction des milieux de culture. Il s'agit en fait de règles simples de gros bon sens pour éviter les contaminations. Considérant cela et sachant que mon besoin à la maison avec les champignons est très ponctuel, je travaille donc à proximité de la flamme de mon brûleur martin. Une solution qui fonctionne bien dans mon cas pour les besoins que j'ai.